Le réemploi, aujourd’hui, où en est-on ?
Un grand nombre d’artisans du bâtiment récupère du matériel et des matériaux laissés par des confrères sur les chantiers et vous faites peut-être partie de ces professionnels. Saviez-vous que vous faites du réemploi ? Vous revalorisez un matériau qui était destiné à la déchetterie. Mais à une plus grande échelle, comment ça se passe ?
Le réemploi existe déjà
- Les chiffres
Selon le ministère de l’Environnement, plus de 10 millions de tonnes de matériaux sont jetées cette année dans le secteur du second œuvre. Alors que, selon des experts, plus de 80% des ces déchets pourraient avoir une seconde vie, seulement 30% sont valorisés. Ce chiffre est très loin des 70% espérés par la Directive Européenne sur les déchets à l’horizon 2020.
Les déchets inertes de gros œuvre comme les briques, la tuile, le béton ou d’autres sont très bien valorisés, à hauteur de 70%, car tous ces matériaux peuvent être recyclés pour en faire de nouveaux matériaux comme du sable ou du béton.
Par contre, les déchets non inertes que l’on rencontre dans le second œuvre sont très peu valorisés car ils sont plus difficiles à recycler. On peut prendre l’exemple de matériaux comme le carrelage, le plâtre, la brique, le mobilier sanitaire ou d’autres qui ne peuvent pas être réutilisés comme on le voudrait.
Point positif : les marges de progrès sont significatives ! Et pour le montrer nous allons vous présenter les acteurs du réemploi et des exemples d’actions de réemploi déjà réalisées.
- Qui fait du réemploi ?
Beaucoup d’acteurs de réemploi sont présents pour conseiller les artisans du bâtiment, les architectes ou les maîtres d’œuvre sur les modalités et les étapes de réemploi dans le bâtiment mais peu d’acteurs sont présents pour encourager et montrer que le réemploi existe déjà et qu’il suffit de faire connaître cette pratique pour qu’elle se développe.
- L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) est un opérateur de l’état qui permet d’accompagner les entreprises, associations ou collectivités dans la transition écologique. Elle soutient financièrement des projets et informe sur les sujets d’économie circulaire.
- Les cabinets d’architecture et de maîtrise d’œuvre sont de plus en plus nombreux à proposer des projets de réhabilitation de bâtiments avec un certain volume de matériaux réutilisés/réemployés. Exemple : Léa Credidio – L’atelier Infini
- Les maîtres d’ouvrage comme les municipalités, L’État ou les particuliers peuvent demander d’inclure des matériaux issus du réemploi dans le cahier des charges du projet.
- Les artisans du bâtiment sont aussi des acteurs du réemploi avec la récupération de matériaux sur les chantiers qu’ils peuvent réemployer/réutiliser sur d’autres chantiers ultérieurement.
- Des associations, comme Océan Réinsertion 44, et des entreprises se spécialisent dans la dépose méthodique dans le but du réemploi de matériaux. Sans dépose propre, pas de réemploi.
Quels types de réemploi ?
- Il est possible de réemployer des matériaux en l’état comme du parquet en bois que l’on peut poser sur un nouveau chantier s’il a été déposé correctement et après une simple remise en état pour garder son coté « ancien ».
- Il est aussi possible de remettre à neuf des matériaux comme des menuiseries afin de les réutiliser sur un chantier intégrant du réemploi.
- Du mobilier, sanitaire par exemple, en bon état peut-être réinstallé sur un chantier au lieu d’être directement envoyé à la benne alors qu’il est utilisable.
Quels projets ?
- Les projets de réemploi sont souvent des projets expérimentaux portés par des cabinets d’architecture dans le but de montrer que c’est possible.
- Ce sont aussi des gros chantiers financés par des collectivités territoriales qui s’inscrivent dans la logique gouvernementale qui tend à aller vers l’économie circulaire.
- Il y a aussi tous les « petits » chantiers quotidiens comme la rénovation d’habitations ou de bureaux où les artisans locaux y intègrent des matériaux déjà utilisés sur des précédents chantiers.
La Belgique, un exemple à suivre
Nos voisins européens comme la Belgique et les Pays-Bas sont beaucoup plus en avance que nous sur ce sujet. Les États-Unis sont aussi en avance dans le secteur du bâtiment.
Par exemple, la Belgique emploie 262 000 salariés pour l’économie circulaire soit plus de 7% de la population active du pays. L’Union Européenne attache une attention particulière au réemploi dans le bâtiment et plus particulièrement dans la construction, alors quand il s’agit de construire un nouveau siège pour le Conseil de l’Union Européenne à Bruxelles, il faut absolument des matériaux réutilisés !
Les architectes ont alors imaginé la façade du bâtiment composée de milliers de châssis de fenêtres. Les entreprises mandatées pour le chantier ont donc récupéré 3 000 châssis en chêne ou châtaigner issus de chacun des Etats membres pour couvrir les 3 890 m2 de façade.
Dans un quartier chic de la banlieue de Sydney, la façade de cette habitation a été imaginée à partir de tôles ondulées de récupération. Certaines sont mêmes rouillées. L’architecture retrace le passé ouvrier et industriel de la région de Sydney. Un bel exemple de réemploi !
La mission d’Articonnex pour le réemploi en France
Pour se développer en France, le secteur du réemploi des matériaux du second œuvre a besoin de pédagogie, de cas concrets et d’une forte visibilité. Les acteurs ont besoin de connaitre les filières de réemploi afin de se mettre en relation plus rapidement et localement, faciliter la circulation des matériaux sur le territoire et donc favoriser le réemploi. Les actions réalisées ont besoin d’être partagées sur tout le territoire français afin de démocratiser cette pratique et ainsi inciter le passage à l’action.
Au vu des initiatives locales et nationales, il n’est plus possible de dire qu’il n’y a pas de filières pour les matériaux neufs ou de réemploi dont le propriétaire d’un matériau n’a pas l’utilité.
Articonnex est une plateforme numérique simple qui permet aux artisans du bâtiment de se mettre en relation afin de s’échanger des matériaux de seconde main localement. Articonnex développe aussi ce magazine numérique pour informer les professionnels sur des sujets d’économie circulaire et de réemploi et diffuser les actions de réemploi réalisées.
La mission est simple de participer à la création de la filière afin que tout le monde agisse pour favoriser ce réemploi et ainsi diminuer considérablement les quantités de déchets dans le secteur du bâtiment.