Le tour du monde du réemploi dans le bâtiment
Aux quatre coins du monde, de nombreuses organisations s’interrogent sur les enjeux de la gestion des déchets et des impacts du secteur de la construction sur l’environnement. Nous vous proposons un petit tour d’horizon des initiatives à l’international.
Le Legacy Living Lab (Australie)
À l’autre bout de la Terre, des chercheurs australiens de l’institut de la Curtin University Sustainability Policy (CUSP), à l’ouest du pays, souhaitent créer un tout nouveau marché pour les matériaux de construction réemployables, par la construction modulaire.
Après des années de recherches, ils dévoilent en octobre 2020 le Legacy Living Lab (L3). Pensé et créé avec la particularité d’être démontable et réemployable sur un autre site en quelques jours. Cet espace de travail est composé de huit modules en forme de boîte, construits hors site et livrés et assemblés directement sur place. Toute la structure et les matériaux qui les constituent sont conservés, et les fondations en bétons ont laissé place à des cadres en acier réutilisés.
Ce système éviterait l’élimination de 18 tonnes de matériaux de construction, et une réduction de 88 % des émissions de gaz à effet de serre. Il présente aussi l’avantage d’un démontage sûr et propre, et une perturbation moindre des espaces et des habitants autour du chantier. Leur prochain objectif, appliquer cette méthode de construction modulaire et démontable au secteur résidentiel.
La pyramide de matériaux de Byggeriet (Danemark)
Des chercheurs du CINARK (Centre for Industrial Architecture), appartenant à la Royal Danish Academy, ont développé une page web permettant de « rendre visible l’impact environnemental associé à la production de matériaux. »
La construction de la pyramide est basée sur les données DEP « Déclaration environnementale de produit » qui décrit les impacts environnementaux. Ces informations sont généralement disponibles sur les sites web des fabricants ou fournisseurs de matériaux. À partir de ces données, ils ont décidé de se concentrer sur la première phase du cycle de vie du bâtiment. C’est-à-dire de l’extraction des matières premières à la production du matériau, lorsque celui-ci est disponible. Ils mettant ainsi de côté tout ce qui s’en suit : le transport vers le chantier, l’installation, l’utilisation…etc. jusqu’à l’élimination ou le recyclage. Avec l’aide de professionnels de la construction, ils ont défini une liste de matériaux les plus utilisés dans la construction danoise.
La pyramide présente alors la hiérarchie des matériaux du plus fort au plus faible impact. Elle s’adapte au choix des filtres proposés, par catégorie de matériaux, mais aussi selon l’impact environnemental sélectionné parmi les 5 plus courants, dont le plus connu de tous, l’empreinte carbone, mesurée en CO2.
Les auteurs de la pyramide nous rappellent que cette dernière n’est pas exacte et figée, et que certains matériaux présenteraient de nombreuses variations dans les résultats selon la composition et la manière dont ils sont produits. Néanmoins, elle reste une très bonne ligne directrice, et a pour vocation d’être un guide pédagogique flexible et amené à évoluer avec le temps.
30 ans d’initiatives (États-Unis)
De l’autre côté de l’Atlantique certains organismes nationaux comme Build Reuse, travaillent sur la question du réemploi de matériaux de construction depuis presque 30 ans. Avec plus de 120 membres, ils proposent des études, accréditations, et formations et ont comme principale mission, de se donner les moyens de transformer les déchets de construction et de démolition en ressources locales.
Parmi les nombreuses initiatives, la ville de Portland, dans l’Oregon, a adopté une réglementation claire qui privilégie la déconstruction à la démolition. On recense dans la ville près d’une dizaine d’entrepôts dédiés au réemploi.
De son côté, le département de gestion des déchets de la ville de Houston a mis en place un entrepôt de réemploi, le ReUse Warehouse, où sont acheminés les matériaux issus de la construction et mis à disposition des associations de la ville. Entre 2009 et 2015, l’entrepôt avait réussi à détourner plus de 2 800 tonnes de matériaux de construction.
Partout dans le monde, de nouvelles initiatives fleurissent et on recense de nombreux organismes et entreprises qui oeuvrent pour la mise en place de solutions en faveur du réemploi de matériaux de construction.
S’il reste du chemin à parcourir avant d’arriver à une gestion optimale des matériaux de construction, ces démarches prennent de l’importance dans les discussions environnementales, à toutes les échelles.
C’est d’ailleurs le cas en France, où volonté de la commande publique est de tendre vers une économie circulaire. Du côté des clients finaux, on remarque aussi une volonté de se diriger vers des solutions plus propres, et respectueuses de l’environnement.